Creutes ou carrières PC Reboul ou St Christophe

Carrières de Calcaire - surface d'environ 4 hectares

 
Le Diaporama
carrière PC reboul St christophe Chapeaumont

Origine du nom :

Cette carrière est constituée de deux ensembles souterrains distincts. L'ensemble s'appel la carrière du PC Reboul, car il fut occupé par les militaires lors de la première guerre mondiale.

 

Exploitation gallo-romaine :

Ces carrières furent exploitées pour leur calcaire grossier dés l'époque gallo-romaine. La pierre pour construire les villages aux alentours. En 1599, quatre carriers de Hautefontaine, Berneuil et Attichy s'engagèrent à tirer des carrières de St Christophe Afin de reconstruire les bâtiments du château de Vic-sur-Aisne, ruinés par le siège de 1590. Ils livrèrent jusqu'à 10 charrettes de pierres par jour. Le calcaire a été exploité sur une hauteur d'environ 3 m. L'exploitation fut essentiellement artisanale et à l'échelle familiale. En 1602, Laurent et Nicolas Boissonnet, tireurs de pierre à Audignicourt, ont extrait la pierre nécessaire au rétablissement du donjon de Vic-sur-Aisne, abîmé dans le même siège.

L'exploitation fut menée par piliers tournés très irréguliers, laissant des fronts de taille perforés de trous. Ces fronts de tailles révèlent que les blocs extraits étaient très allongés (3 m x 0,4 m), lui donnant un aspect "d'accordéon" typique des carrières de l'Aisne.

Piliers tournés carrés avec un banc de retard à la base.
Front de taille en "accordéon" caractéristique de l'Aisne.
 

Il reste dans la partie Ouest de la carrière, un beau charroi à pierre. Même s'il n'est pas complet, le châssis possède encore de belles roues à bandage (bande de caoutchouc correspondant à l'ancêtre du pneu à air) dont les essieux sont en bois. Elle date sans aucun doute de la fin du 19ème siècle.

A partir du début du 20ème siècle, la partie Ouest fut convertie en champignonnière comme en témoigne les traces de chaulage sur les parois des galeries, ainsi que l'ancienne signalétique des "caves" à champignons.

Charroi avec ces roues en bois.
Signalétique d'une cave à champignons.

 

 

Un Poste de commandement militaire française :

Ces creutes servirent d'abris, aux troupes françaises, lors de la grande guerre. Etant relativement éloigné des premières lignes, la carrière fut retenue par l'armée pour y installer un poste de commandement en 1916. Il était géré par le lieutenant colonel Reboul. Il dirigeait le 98 Régiment d'infanterie des chasseurs alpins. Le 256 R.I occupa également le site. Ces bureaux furent aménagés dans la partie Ouest de la carrière de façon troglodyte, afin de bénéficier d'un maximum de lumière et de confort. Ce poste de commandement est appareillé en magnifique pierres de taille, extraites directement de la carrière. Il est ornementé d'un blason décoré de feuilles de chêne. A proximité du cavage on observe plusieurs ruines d'appartements des officiers, ainsi que les restes d'un ancien escalier qui permettait de monter au-dessus du PC.

Bureau du post de commandement du commandant Reboul.
Poste de commandement avec les officiers.
 

Photo montrant le blason intact et des caillebotis contre la boue (coll. Soissonnais 14-18)
Escaliers aménagé prêt de l'entrée (coll. soissonnais 14-18)
 
L'intérieur des creutes furent consolidés par de multiples et solide piliers maçonnés. Plusieurs remontées, équipées d'escaliers creusés dans la masse, ont été taillées par les militaires, afin de rejoindre directement les réseaux de tranchées. La présence du poste de commandement explique sans doute la présence d'un poste téléphonique dont l'emplacement est signalé par une gravure. Cela implique la présence d'électricité dans la carrière. Il reste également un foruneau à double foyers en briquettes réfractaires présent à l'emplacement des anciennes cuisines.

Piliers maçonnés de renfort édifiés par les militaires.
Tunnel de sortie vers les tranchées.
 

Ancien four à pain construite en briquettes réfractaires.
Localisation de l'ancien poste téléphonique.
 
Il faut signaler également, de nombreux vestiges d'appartements d'officiers comme de belles cheminées, des murages en pierres de taille et des sols bétonnés. On trouve également deux belles niches, dont l'une est ornée d'une croix de guerre. La présence des appartements d'officiers confirment que le site n'était pas exposé directement aux combats.

Cheminée du lieutenant Vousset du 264e régiment.
Niche avec une croix de guerre sculptée.

 

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Deux personnalités dans une seule carrière :

Les soldats, lors de leurs longues heures d'attentes, laissèrent libre cours à leur imagination en sculptant les parois de la carrière. Parmi les quelques sculptures et graffitis présents sur le site, on peut noter les représentations de deux personnages ayant servi la propagande militaire :

- Une représentation de Lord Kitchener (1850-1916), qui fut le ministre de la guerre britannique en 1914. Sa carrière avait fait de lui un véritable héros national et son effigie sur les affiches de recrutement, d'après un portrait d'Alexander Bassano, avait encouragé des millions de volontaires à s’enrôler. Il réussit à faire passer en peu de temps l'armée britannique de 150 000 soldats de métier, à plus de 1,5 millions de mobilisés. Il gonfla encore les effectifs à plus de 3 millions de soldats, via sa loi de conscription de janvier 1916. Il organisa l'armée de volontaires envoyée sur le front français.

Sculpture et portait de Lord Kitchener
Affiche de propagande pour le recrutement, avec son portait.
 
- Le portait de l'infirmière Edith Cavell (1865-1915). En 1909, elle fonde à Bruxelles une école d'infirmières. Quand la Première Guerre mondiale éclate, l'hôpital est pris en main par la Croix Rouge. Edith Cavell et ses élèves soignent les blessés des armées alliées et allemandes. Elle aide éagalement des centaines de soldats alliés à passer de la Belgique occupée vers les Pays-Bas neutres, en violation de la loi militaire. En 1915, elle est arrêtée et conduite devant une cour martiale par les Allemands. Elle ne se défend pas, admettant les actes qui lui sont reprochés et est fusillée par un peloton d'exécution à 2 heures du matin, le 12 octobre, devenant un martyr populaire et entrant dans l'histoire britannique comme une héroïne. L'affaire Edith Cavell est devenue un élément important de la propagande britannique pendant la guerre. L'exécution a eu lieu au Tir National, un site militaire, où elle a été enterrée.

Sculpture et portait de l'infirmière Edith Cavell.
Edith Cavell entourée de ces infirmière.
 

Dessins de propagande, anti -allemands, relatant le destin d'Edith Cavell, faisant d'elle une martyre de guerre.

 

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La monumentale chapelle souterraine St Christophe :

Cet autel, construit en trois phases (juin 1916, automne 1916 et janvier 1917), est sans doute celui le plus travaillé que l'on puisse trouver dans les carrières du Soissonais lui donnant un aspect quasi baroque. Il est l'œuvre de 4 sculpteurs dont un architecte (L.Lecler, L.Chavalan, Th.Roure, A.Livebardon). L'emploi de sanguine renforce cette impression surchargée.

- Il est intéressant de remarquer que les symboles militaires sont très présents : de nombreux blasons évoquant les 4 régiments d'infanteries (16e, 97e, 98e, 264e, 265e) accompagnés des noms de grandes batailles auxquelles ils ont participé. Les soldats du 98e régiment étaient des chasseurs alpins, comme l'évoque discrètement le petit chamois sculpté.

Le magnifique autel de St Christophe
Détail signalant le passage des chasseurs alpins.
 
Ancienne carte postale montrant le crucifix encore intact.
Grille mise en place suite au classement de l'autel à la liste de MH.
 

- Les symboles religieux sont au final minoritaires dans cette réalisation. Sur la croix centrale se trouvait un crucifix, comme on peut le voir sur l'ancien cliché ci-dessus. Le calice et l'hostie sont présents à la base de l'autel. Une épitaphe rehaussée de sanguine surmonte l'autel "Vive le christ qui aime les Francs". A la base de l'autel se trouve deux baïonnettes et une épée qui représentent subtilement le "Chrisme". Le chrisme est un symbole chrétien formé des deux lettres grecques X (chi) et P (rhô), la première apposée sur la seconde. Il s'agit des deux premières lettres du mot "Christ" quand il est écrit en grecque.

Détail du Chrisme situé dans la partie basse de l'autel.
Représentation originel du Chrisme.