Les carrières souterraines par piliers tournés
 

Au 12ème siècle l'explosion économique de l'occident médiéval, entraîne une croissance démographique importante. Il y a alors un besoin, en pierres de construction, mais également en terres cultivables, autour des grandes villes. Cela oblige les carriers à poursuivre l'exploitation du calcaire grossier en souterrain.

Méthode des piliers tournés irréguliers :

Le passage en souterrain de l'exploitation du calcaire grossier, se fait dans le prolongement des fronts de tailles des anciennes carrières à ciel ouvert. Ces entrées, vont alors donner naissance aux bouches de cavages, que l'on peut encore apercevoir dans de nombreux coteaux de la Seine ou de l'Oise.

Plusieurs cavages très réguliers (Migné)
Cavages à Conflans-Saint-Honorine
 
Les carriers exploitaient des réseaux de galeries à peu près parallèles entre elles et se recoupant. Ainsi, ils isolaient des masses de pierres qu'ils contournaient, d'où le terme de pilier tourné. Le haut des piliers est souvent évasé permettant d'augmenter la portance du ciel de carrière. Le pourcentage de la masse de calcaire extraite, ou défruitage, a eux tendance à diminuer. En effet, au départ les carriers voulaient exploiter un maximum le banc calcaire, aboutissant souvent à des effondrements.

pilier tourne

Organisation des carrières souterraines à piliers tournés, avec accès bouches de cavages
 
pilier tourne
pilier tourne
Pilier tourné sous Paris avec restes d'exploitation
Pilier tourné (carrière à Charenton)

 

 

Création de nouveaux accès aux carrières :

En s'éloignant des bouche de cavages, il devient nécessaire de créer un nouveau mode d'accès aux carrières, à partir des plateaux. On créa alors, au 13éme siècle, le plan incliné ou descenderie. Pour cela on doit entailler le plateau jusqu'au calcaire exploitable. Sur Paris, la carrière des chartreux sous l'actuel Luxembourg, fut sans doute la première de ce type. Cependant la réalisation de ce type d'accè nécessitait beaucoup d'hommes, d'argent et de surface. De ce fait, le nombre de ce type d'accès fut limité.

pente douce carriere
Carrière souterraine à piliers tournés, avec accès en rampe inclinée
 
pente douce carriere
pente douce carriere
Plan incliné avec wagonnet chargé d'un pierre
Plan incliné avec voie étroite pour wagonnets

 

Au cours du 15ème siècle, les puits d'extraction se multiplièrent surtout pour les petites carrières. Etant moins couteux et moins consommateurs de terre arable, ils supplantèrent les plans inclinés. On les équipaient de treuils afin de hisser la pierres hors de la carrière. A cette époque, les carrières de calcaire grossier, s'étendirent surtout dans le sud de Paris. Les bancs calcaire y sont moins profond et on atteint donc moins rapidement la nappe phréatique de la Seine.
puits carriere
Carrière souterraine à piliers tournés, avec des puits d'extraction

 

puits carriere
puits carriere
Intérieur d'un puits d'extraction reconverti en puits d'aération
Treuil de carrière équipé d'un moteur
 
Les limites de cette méthode réside dans le fait que les piliers représentent un gros volume de calcaire non exploités. Aussi, vers le 16ème siècle, des carriers de Paris mirent au point une nouvelle méthode d'exploitation par "Hague et Bourrage". Mais cette technique va rester très locale.

 

 

Méthode piliers tournés réguliers :

Progressivement, les carrières de calcaire grossier ont été repoussées jusqu'en périphérie de l'Ile-de-France (Méry-sur-Oise, Saint-Leu-d'Esserent...). Elles furent exploitées plus longtemps et la méthode des piliers tournées s'est maintenue, quand la présence de banc calcaire sur de grande hauteur la rendait rentable. La technique s'est perfectionnée et les piliers sont devenus de plus en plus réguliers, pour finir de forme carrée. Le taux de défruitage s'est établit au alentour de 50% de masse calcaire.

pilier tourne
pilier tourne
Carrière exploitée par pilier tournés carrés à la lance (Savonnière-en-Perthois)
Carrière exploitée par pilier tournés carrés intercalés de hagues (Savonnière)
 
Finallement, ces carrières virent apparaître l'exploitation mécanique du calcaire avec la haveuse à chaîne. Les piliers devinrent encore plus lisses et réguliers, formant un paysage en damier. Avec la mécanisation, la question de rentabilité ne se posa plus de la même manière. En effet, les économies se sont faites sur la réduction de la main d'oeuvre (très importante avec la"Hague et bourrage") et non sur l'exploitation du seul banc intéressant.
pilier tourne
Carrière exploitée par piliers tournés carrés à la haveuse ( Merry-sur-Oise)