Organisation des "caves" de champignons

 

Lorsqu'une carrière était reconvertie en champignonnière, elle était alors compartimentée en "chambres de culture" ou caves. L'objectif était de pouvoir maintenir une température constante d'environ 12°C et de réguler le taux d'humidité selon les besoins. Cette reconversion avait lieu après l'arrêt de l'exploitation de la pierre ou en parallèle, dans les secteurs où l'on ne tirait plus la pierre.

Cloisonnement en "chambres de  culture":

Les champignonnistes ont cloisonnés les chambres, ou cave, de culture avec diverses matériaux suivant les époques. Au début des champignonnières construisaient des murs en pierres sèches, à la manière des hagues d'exploitation. Plus tard, ces murs de pierres ont laissé la place à des cloisons de plaques de plâtre, dont l'édification était moins fastidieuse. Enfin, avec l'ère du plastique, les cloisons ont été réduites à de simples films plastiques. Ces dernières sont très facilement déplacables selon les besoins. On entrait dans ces caves par des portes battantes en bois puis en métal.

culture champignons meules champignonnière champignnonnières carrière
cloison placoplatre
Reste de cloison plastique, à Herblay
Chambre de culture limitée par des mûrs de pierres, à Méry-sur-Oise

 

Porte battante en bois de cave à champignons. (St Maximin)
Porte battante en métale de cave à champignons. (St Maximin)

 

 

Gestion de la cave :

Chaque cave était gérée par un ou plusieurs ouvriers selon sa taille. Ils étaient chargés du suivit de la culture, de la régulation de la température et de l'humidité et de la récolte des champignons. Les récoltes en "paniers de champignons", de la cave, étaient comptabilisées sous forme d'un tableau de récolte. Il était écrit sur un pilier à même le calcaire. Il comportait : l'année, les mois de récolte et le noms du ou des cueilleurs. Par la suite, cette pratique disparut au profit de tableau papier.

Parfois, les caves recevaient un nom spécifique (Venise, comète...) ou un simple numéro. Près de cet intitulé on marquait la date de "lardage", c'est à dire d'ensemencement, sachant que la récolte durait ensuite 3 mois consécutifs.

 

Tableau de comptage de paniers à Vineuil (photo Niko)
Tableau de comptage de paniers datant de 1941, à Vineuil (photo Niko)
 
cave champignons champignonnière
Panneau d'orientation indiquant les caves à champignons. (St Maximin)
"Cave N°1" lardée le 24 décembre 1953, à la Savonnière en Perthois
mom champignonniere
mom champignonniere
Inscription d'une ancienne cave
Noms de champignonnières, à Méry-sur-Oise

 

 

Régulation de l'humidité :

L'humidité des caves devait être surveillées en permanence. En effet, les besoins en humidité des champignons sont importants, mais également varient selon les étapes de leur cycle de développement. Tout l'art du champignonniste est de savoir estimer les besoins en humidité des champignons de la cave, simplement en touchant le substrat de culture !

Ensuite, ce dernier réajuste l'humidité, soit en :

- augmentant l'humidité, via des arrosages effectués à l'aide d'arrosoirs à pomme très fines. A l'époque de la culture en meule, on arrosait le sol ("mouiller en sentier") ou les meules ("mouiller en panne"). On trouve souvent des restes d'arrosoirs, mais également des citernes de stockage d'eau. En général, les champignonnistes récupéraient l'eau d'infiltration des failles de la roche, en la canalisant dans ces citernes. Avec la modernisation, l'eau d'arrosage est apportée directement par un système de tuyauterie.

arrosage champignonnistes champignonnières
reservoir eau champignonniste champignonnière
Arossage des champignons dans la carrière Carrara.
Cheminée d'appel pour faire circuler l'air à l'époque des poêles.
 
reservoir eau champignonniste champignonnière
Fût en métal recouvert de calcite
Robinet raccordé à la tuyauterie d'eau.
 
- abaissant le taux d'humidité grâce à une ventilation. Cette ventilation se faisait par de simples trous, à ouverture modulable, dans les cloisons. Par la suite, ils furent équipés des ventilateurs électriques. L'aération globale de la carrière était assurée par des puits d'aération communicant avec la surface. Ces puits étaient creusés spécifiquement ou correspondaient à une réutilisation d'anciens puits d'extraction. On installait à la base du puits un poêle à coke afin de créer un appel d'air. Aujourd'hui laprise d'air sur le puits se fait via un ou plusieurs ventilateurs qui répartissent l'air dans les différentes caves. Le plus souvent, ces puits d'appel d'aire sont rehaussés en surface par des cheminés en pierres sèches qui se voient de loin dans les champs.
puits aération champignonniste champignonnière
ventilateur champignonnière
Cheminée d'appel pour faire circuler l'air à l'époque des poêles
Ancien ventilateur (Carrières-sur-Seine)
 


Partie intérieur d'une prise d'air raccordée un ancien puits d'aération
( Carrière de Saint-Leu-Esserant )

Partie extérieure d'une cheminée d'aération (Carrières-sur-Seine)

 

 

Régulation de la température :

Il fallait également réguler la température. Contrairement à l'humidité, il fallait plutôt la maintenir constante au alentour de 12°C. Un réchauffement était rare, mais pouvait survenir en début de culture, lors de la fermentation du compost. Il suffisait alors de ventiler pour la faire chuter. Cependant, la majorité du temps il fallait plutôt réchauffer la cave, même si les pertes de chaleurs étaient limitées par les cloisons.

Rapidement, les champignonnistes ont mis en place des chaudières destinées à réguler la température de plusieurs champignonnières à la fois. La chaleur était diffusée soit par des conduites d'air chaud, soit par des radiateurs fixés sur les parois calcaires. Les chaudières se sont modernisées progressivement et ont gagnées en puissance. Le mode d'énergie évolua également passant du bois, au charbon et enfin au pétrole ou à l'électricité.

chaudiere fuel
chaudiere charbon
Chaudière à pétrole (Carrières-sur-Seine)
Chaudière à charbon (Carrières-sur-SeineS)
 
radiateur champignons
Chaudière à air (Méry)
Radiateurs à eau (Méry)

 

Etat sanitaire de la cave :

L'Agaric doit être protégé des champignons pouvant le parasiter et de ceux qui entrent en compétition avec lui pour le compost.

Les murs des chambres de cultures étaient régulièrement badigeonnés de chaux. La chaux permettait d'éviter le développement de maladies (le plus souvent des champignons parasites) risquant de s'attaquer aux cultures de champignons. La chaux fut le plus souvent déposée au pinceau, mais dans les champignonnières modernes, on la projette à l'aide d'une machine. Celà forme un véritable crépi qui recouvre intégralement toutes les cloisons des chambres de cultures.
D'autre part, entre chaque cycle de culture de 3 mois, la cave est complètement vidée, chaulée et les supports de cultures (comme les cagettes) sont désinfectés dans des bains de formol. Dans les exploitations modernes, on traite également la cave à l'aide d'un fongicide, qui détruit les éventuels spores de champignons parasites.
front taille
cagette champignons
Murs entièrement chaulés de façon mécanique (Carrières-sur-Seine)
Cagette attaquée par des champignons saprophytes (Carrières-sur-Seine)