Postes de secours et
ambulances :
Les
creutes représentaient des endroits stratégiques
pour établir un lieu de soin des blessés en
provenance du front. Ces carrières souterraines étaient
identifiables par une croix rouge placée
sur un drapeau ou gravée à l'entrée.
|
|
|
Deux
brancardiers régimentaires transportant un soldat blessé
à la tête vers un poste de secours.
|
Poste
de secours allemand signalé par un drapeau muni d'une
croix rouge.
(coll. Malinowski) |
|
Suivant
la distance qui séparait la creute du front de bataille
et sa taille, on distinguait dans le langage militaire deux
types d'infrastructures destinées aux blessés.
"Poste
de secours" :
Si
la carrière était distante de moins d'un ou
deux kilomètres du front, elle était appelée
"Poste de Secours". Les "brancardiers
régimentaires" y apportaient, par brancard,
les soldats en provenance du front. Le poste de secours
était dirigé par le médecin
auxiliaire, qui en théorie, n’avait
pas à procéder à des interventions
chirurgicales. Dans les faits, il pratiquait des opérations
quand les blessures du soldat ne permettaient pas l'évacuation.
Si la creute était assez grande et pas trop loin
d'une voie carrossable, on qualifiait le poste de secours,
de poste d'évacuation. On y dispensait
les premiers
soins et on changeait les pansements qui avaient été
placés en urgence par le brancardier. A partir de
1917, des pharmaciens et des dentistes furent affectés
aux postes de secours. L'objectif était de préparer
le soldat pour son évacuation vers une "ambulance".
|
|
|
Brancard
réglementaire allemand retrouvé dans un poste
de secours vers Soissons. |
Gravure
indiquant la présence du poste de secours du 238éme
régiment, situé dans la carrière de Confrécourt. |
|
|
|
Le
coq, symbole de la France, localisant le poste de secours
du 324ème régiment d'infanterie
- carrière des 5 piliers. (photo Titan)
|
Signalétique
d'orientation pour
rejoindre le poste de secours installé par le 324ème
régiment d'infanterie entre le 8 et 9 mai 1918 - carrière
des 5 piliers (photo Titan) |
|
L'ambulance divisionnaire :
Elle
était installée dans des carrières plus
en arrière du front, situées au calme. On y
faisait le tri entre les blessés légers, qui
restaient sur place et les blessés graves, pour conduire
ceux-ci vers les Hôpitaux. Il existait une ambulance
par division et chacunes portait un numéro. Elles étaient
placées sous la direction du médecin
chef du régiment assisté d'un médecin
aide-major par bataillon, d'un médecin auxiliaire par
compagnie, d'infirmiers et de "brancardiers de corps".
Bien souvent, l'afflux important de blessés transformait
ces lieux en de véritable unité médico-chirurgicale
assimilable à un hôpital de campagne
souterrain. De nombreux lits (parfois jusqu'à une centaine)
y étaient installés et des règles d'hygiène
assez strictes s'y appliquaient. Un épaisse couche
de paille était disposée par terre et contre
les murs afin d'isoler les patients du froid. Parfois, on
édifiait des petites pièces maçonnées
afin d'isoler les blessés les uns des autres.
|
|
|
Extérieur
d'une ambulance allemande. On distingue à gauche
la croix rouge signalant la fonction de la carrière.
(coll. Malinowski)
|
Intérieur
d'une ambulance dans les Grottes de Gény en 1915 -
On distingue de nombreux blessés sur des lits confectionnés
de simples branchages. On aperçoit sa sacoche derrière
le médecin. (coll. Malinowski)
|
|
|
|
A
l'entrée de l'ambulance de grottes de Gény en
1915 - Brancardiers faisant bouillir de l'eau destinée
à nettoyer les plaies et à désinfecter
les outils des médecins. (coll. Malinowski)
|
Ambulance
souterraine à Vendresse, 30 août 1915 - Ce cliché
est très intéressant car on distingue en arrière
plan un médecin chef, au second plan un brancardier
qui épaule un blessé et au premier plan un infirmier
s'occupant d'un autre soldat. (coll. BDIC)
|
|
L'hygiène
en carrière :
|
Les
brancardiers avaient également pour mission de
veiller aux respect des normes d'hygiène. Ce rôle
était primordial au sein des creutes surpeuplées
où grouillaient dans la litière les puces
et les poux, sans parler des odeurs nauséabondes.
Ces brancardiers étaient chargés de veiller
à la qualité de l'eau, du couchage et d'administrer
les vaccins.
"Nous allons en réserve
dans une carrière de pierre, éclairée
à l'acétylène. Malheureusement
dans ces cavernes, tout n'est pas drôle, la vermine
nous dévore, poux, puces, rats, souris pullulent.
De plus, c'est très humide et beaucoup de soldats
tombent malades." (A. Lavollé
du 4ème Cuirassiers)
|
Séance d'épouillage chez les poilus (coll. Malinowski)
|
|
Ces
règles d'hygiène avaient été décidées
par certains officiers et s'inscrivaient dans le règlement
intérieur. Ces règles se généralisèrent
petit à petit dans toutes les carrières du Soissonnais,
afin d'organiser au mieux ces lieux collectifs souvent surpeuplés:
-
Les dortoirs devaient être installés
en dehors des zones de circulation.
-
Obligation de changer régulièrement la paille
humide par de la paille fraiche, tout en poursuivant la
construction de lits pour tous les soldats.
-
Les latrines devaient être vidées
quotidiennement et désinfectées à la
chaux.
-
Les ordures devaient être évacuées à
l'extérieur.
-
L'éclairage du côté français
était sommaire car constitué de simples bougies
ou de lampes acétylène. Quand les allemands
prenaient une creute, ils installaient le plus souvent un
éclairage électrique.
-
Canalisation d'eau et stockage dans des
citernes, afin de limiter les corvées d'eau et de
disposer d'eau claire et non stagnante.
|
|
|
Lavabo
creusé à même la roche relié à
une citerne en béton. (les Chauffours)
|
Citerne
d'eau semi-enterrée avec son lavabo, sans doute liée
au poste de secours. (Carrières de Confrécourt)
|
|
La
gestion des morts en carrière :
La
dernière tâche attribuée aux brancardiers
régimentaires était la gestion des morts. Leur
prise en charge rapide était importante à la
fois pour le moral des troupes et d'un point de vue sanitaire.
Ils avaient finalement un rôle de fossoyeur.
Les morts, des troupes cantonnées dans une creute,
pouvaient être enterrés à proximité
quand les combats ne permettaient pas d'évacuer les
morts vers un cimetière militaire. Les soldats des
creutes enterrèrent leurs morts à deux endroits
différents :
-
Soit à l'extérieur de la creute,
ce qui parait finalement assez logique d'un point de vue
sanitaire. On retrouve parfois quelques stèles groupées
à proximité des cavages. C'était le
cas à la carrière des Chauffours. Malheureusement
la quasi-totalité des stèles a été
volées par des collectionneurs de militaria dans
les années 90.
-
Soit à l'intérieur de la creute.
Cette pratique était plus courante qu'on ne pourrait
le penser. Un cimetière de ce type à été
retrouvé dans la célèbre "grotte
du dragon" et certaines stèles sont toujours
visible. Les soldats étaient amenés à
enterrer leurs morts à l'intérieur surtout
quand ils étaient complètement retranchés
dans la carrière. Nombreuses furent les unités
qui furent totalement coincée, pendant plusieurs
jours, à l'intérieur d'un creute. Quand l'ennemi
arrivait à prendre possession de la carrière,
il se retrouvait à devoir gérer les morts
du camps adverse.
|
"Nous
sommes dans une carrière où 120 Boches,
recouverts seulement de 30 à 40 centimètres
de terre, sont enterrés. Ils répandent une
odeur infecte qui finira bien par nous empoisonner".
"J'habite dans une carrière où il y
a au moins 400 Boches d'enfouis. Ca infecte et il faut
boulotter là-dedans et y coucher le jour."
(Grotte
du Dragon - contrôle postal du 29 août 1917)
|
|
|
Cimetière
allemand découvert par les français de la "Caverne
du Dragon" - 1917 |
|
|
|
Construction
de cercueils devant des appartements d'officiers. |
Brancardiers
en train d'enterrer un soldat. |
|
Dans
ces cimetières de petite taille, le soin apporté
aux stèles était important.
Le plus souvent elles sont ornées de feuilles de chêne
ou de laurier et de médailles de guerre. Les soldats
se servaient des pierres de taille des carrières où
ils demeuraient. Les creutes fournirent également les
pierres nécessaires à l'édification de
nombreux monuments aux morts.
|
|
|
Préparation,
par les allemands, de blocs destinés aux pierres tombales
- Carrière des 5 piliers (coll. Bonnard - Guénaff) |
Pierres
tombales allemandes du cimetière de la "Caverne
du Dragon". |